Si vous avez lu son excellent livre 39 leçons d’économie contemporaine, vous n’avez pu manquer la trente-quatrième leçon : « De l’incidence de la Sécurité sociale sur le chômage ».
L’auteur prévient : « la Sécurité sociale obligatoire est elle aussi responsable du chômage dans une économie de marché ». Je vais essayer d’expliquer son raisonnement (toute erreur dans ce qui suit est uniquement mienne, car j’adapte légèrement la présentation de Simonnot).
Etudions de près les rémunérations des salariés dans un monde idéal et distinguons deux cas de figures possibles :
- cas 1 : le salarié reçoit l’intégralité de son salaire et le gère à sa guise ;
- cas 2 : le salarié ne reçoit pas l’intégralité de son salaire, mais bénéficie en échange d’une protection sociale, que le patron présente comme un avantage en nature.
Que se passerait-il si les salariés avaient le choix ? Tout dépendrait de la qualité de la protection sociale offerte. Si elle était de bonne qualité et à un prix raisonnable, sans doute les salariés se répartiraient-ils dans les deux catégories. Mais si ce n’est pas le cas, tous préfèreront la solution 1 et bouderont l’avantage en nature (qui deviendra un désavantage).
Si maintenant le patron (en fait l’Etat) n’offre que la solution 2, que va-t-il se passer ? Les salariés seront mécontents de leur salaire ; étant donné qu’ils considèrent l’avantage en nature comme nul, ils jugent que leur salaire devrait être celui qu’on leur aurait versé dans le cas 1. A ce prix-là, ces « mauvais coucheurs » seront moins disposés à travailler, car ils s’estiment sous-payés. Ainsi se développe un type de chômage particulier, le chômage volontaire (décrit dans la 30ème leçon du livre). Je cite l’auteur :
Du fait que la Sécurité sociale est obligatoire, les cotisations prélevées et les prestations reçues par les salariés peuvent être considérées comme des salaires en nature. Si l’employé considère que le prix payé pour cette protection sociale imposée est nettement supérieur aux bénéfices qu’il en reçoit, il aura des exigences de salaire presque aussi élevées que s’il n’était pas couvert par la Sécurité sociale (situation 1). Mais les patrons maintiendront leur salaire monétaire au niveau atteint après prélèvement des cotisations sociales (situation 2). Il en résultera un recul de l’emploi et un accroissement du chômage volontaire (...). Par contre, si les salariés pouvaient s’assurer librement auprès de l’organisme de leur choix, comme ils le font pour leur automobile ou leur maison, ils retrouveraient l’entièreté de leur salaire sur lequel ils prélèveraient eux-mêmes leurs primes d’assurance. L’emploi se trouverait à un niveau supérieur (situation 1) par recul du chômage volontaire.
La seule chose que l’économiste dit est qu’il y a incompatibilité entre l’économie de marché d’une part, et d’autre part tout règlement ou institution (salaire minimum, horaire fixe de travail, interdiction de licenciement, Sécurité sociale), et que cette incompatibilité génère du chômage.
Et contrairement à ce que voudraient nous faire croire les collectivistes, toutes ces règlementations (et notamment la Sécurité sociale) profitent surtout aux patrons et aux gouvernements (davantage de chômage = moins de grèves, plus de main-d'oeuvre disponible sur le marché) ! L’auteur termine :
Aucun gouvernement n’a vraiment pris les moyens de lutter contre le chômage, car ces moyens sont incompatibles avec sa propre existence. Mettre en cause la Sécu serait signer son arrêt de mort immédiat. Aussi le discours antichômage est-il le discours le plus hypocrite que l’on ait tenu depuis longtemps. (...) Peut-être faudrait-il faire l’éloge de l’hypocrisie comme mode de « contrat social ».
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